sans faire de bruit (suite) *
21 novembre 2012 § Poster un commentaire
Des aiguilles fichées dans le corps, calée dans un lit devenu hamac, dans le cabinet du vieux docteur Tran, pas très loin de Nation. Ce jour-là je n’ai pas de voisine, mais c’est pareil à chaque fois : après l’épinglage, avant de remonter la minuterie, il choisit avec soin parmi les vêtements que j’ai laissés en tas sur la chaise ceux qui sont les plus légers, pour ne pas gêner les aiguilles, et les dépose délicatement sur mon corps – un chemisier rose saumon pour le haut, une grande écharpe en coton fin, pas vraiment de saison, pour le bas. Il n’oublie jamais notre dernière conversation. Il me demande si je profite bien de Rome l’insaisissable. Il rigole moins, il cause tristesse, la faute au temps gris frisquet et de ses quatre-vingt-dix ans passés. Le docteur Tran est au bord de la mort, il le sent et ça se sent. Il tâte mon pouls et dit voilà, ça va mieux, ça y est. Au moment de se quitter il me serre la main et me fait : c’est peut-être la dernière fois qu’on se voit. Il ajoute : novembre est triste, novembre est triste.
* j’ai déjà parlé du Dr Tran dans le Bathyscaphe 7
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