la tête dans les nues

21 avril 2015 § Poster un commentaire

« Grimm m’a dit plusieurs fois que j’avais été fait pour un autre monde. Je ne sais si cela est vrai, mais ce qu’il y a de certain, c’est qu’il y a bientôt cinquante ans que je suis étranger dans celui-ci, que je vis d’une vie imitative qui n’est pas la mienne, que je me plie sans cesse à l’allure des autres, et que je suis comme un chien qu’on apprend à marcher sur deux pattes. De là une démarche tantôt originale et tantôt gauche. Ce qui s’échappe de moi, ne vaut jamais ce qui s’y passe. Je ne parle bien qu’avec moi, ou avec les autres quand je n’y pense pas. Plus j’écris vite, mieux j’écris. Quand il m’arrive d’avoir de l’esprit, j’en ai beaucoup. J’ignore encore ce que je puis faire. Les grandes actions et les belles choses m’affectent de la manière la plus violente et la plus durable. Si je n’y prends garde, je suis tout prêt à me les approprier. La tête dans les nues, j’aperçois une paille à terre. Ce que j’ai une fois admiré, je l’admire toujours. Je fais peu de cas de ce qui ne saurait répondre à mon cœur. C’est pourquoi j’aime mon semblable de préférence à tout. Faites, si vous pouvez, que ce morceau de marbre jouisse de ma surprise et je ne m’en séparerai jamais. C’est pourquoi deux yeux tendres m’offrent un plus beau spectacle que l’univers.»

Diderot (1763)

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