Prunes bleues

15 juin 2007 § 4 Commentaires


Je me souviens des prunes bleues succulentes. Elles se faisaient de plus en plus rares, d’année en année. Le feuillage se clairsemait d’été en été, se tachetait davantage. Il fallut un jour abattre l’arbre. Il était atteint d’une maladie inconnue. Je me souviens du bois foncé qui brûlait un soir, et du vide alors créé dans le verger qui était déjà pauvre. Une absence, et je pouvais poser le pied sur le tronc tranché légèrement enfoncé dans le sol, une sorte de souche cachée, un curieux creux, solide. C’était ce qui restait de l’arbre.

Je pouvais me souvenir. Les prunes bleues devenaient noires quand je les frottais sur ma petite veste. Et leur chair était presque rouge. Jamais je n’ai goûté les mêmes par la suite. J’ai dansé sur un pied, quelques années, sur le reste de l’arbre enfoncé dans l’herbe. Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus trace de lui, qu’il ait été avalé par la terre.

J’ai en mémoire son écorce noire et luisante, tachetée de champignons friands de mort, qui brûlait lentement. Il avait fallu penser au prunier sauvage, au pommier nain, et aux pommes d’hiver, au mélèze qui les abritait tous de sa hauteur, au noyer le plus lent du monde : verger minuscule qui suffisait à faire danser, même en portant un creux.

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